Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/526

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diées du vaste et triste château de Willingham à l’humble et heureux presbytère de Knocktarlity. Cependant, au milieu de ces inutiles murmures, les années s’écoulaient. John, duc d’Argyle et de Greenwich, mourut en 1743, universellement regretté, mais surtout par les Butler, auxquels il avait donné des marques si étendues de sa bienveillance. Ses biens passèrent à son frère, le duc Archibald, avec lequel ils n’eurent jamais de relations aussi intimes, mais qui leur continua la protection que le duc son frère leur avait accordée. Cette protection leur devint plus nécessaire que jamais ; car, après la révolte de 1745 et la dispersion des insurgés, la tranquillité des pays adjacents aux hautes terres fut considérablement troublée. Des maraudeurs, ou des hommes que le désespoir avait réduits à ce genre de vie, se rassemblèrent dans les retraites que leur offraient les montagnes les plus voisines des basses terres, qui devinrent le théâtre de leurs déprédations, et il n’est presque pas un vallon dans les environs pittoresques et maintenant si paisibles de Perth, de Stirling et de Dumbarton, dans lequel un ou plusieurs d’entre eux n’eussent établi leur résidence.

Le fléau de la paroisse de Knocktarlity était un certain Donacha-Dhu ou Dunaigh, c’est-à-dire le noir Duncan-le-Méchant, dont nous avons déjà eu l’occasion de parler. Cet homme avait été autrefois chaudronnier ambulant, et faisait partie de ces vagabonds qui rôdaient dans ces cantons ; mais quand la police fut désorganisée par la guerre civile, il abandonna sa profession, et de demi fripon il se fit tout à fait voleur à la tête de trois ou quatre jeunes gens actifs et vigoureux ; étant lui-même hardi, entreprenant et parfaitement familiarisé avec tous les défilés des montagnes, il exerça son nouveau métier d’une manière très-lucrative pour lui-même et très-affligeante pour le pays.

Tout le monde était convaincu que Duncan Knock aurait pu réduire son homonyme Duncan-le-Noir, s’il l’eût voulu, car il y avait dans la paroisse une compagnie de jeunes gens vigoureux qui s’étaient réunis sous les drapeaux d’Argyle, et qui ayant à leur tête Duncan lui-même, s’étaient bravement comportés dans plusieurs occasions. Et comme personne ne doutait du courage du chef, on supposait généralement que Donacha avait trouvé moyen de se concilier ses bonnes grâces, ce qui n’était pas très-rare dans ce siècle et dans ce pays. On était d’autant plus porté à le croire, que les bestiaux de Davie Deans, qui appartenaient au