Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 27, 1838.djvu/65

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conseillers. « Je soumettrai l’Écosse à mon autorité, disait-il, comme j’y ai déjà soumis le pays de Galles. »

Ce souverain, non-seulement un des plus habiles généraux, mais encore un des plus subtils et des plus hardis politiques d’alors et même de tous les temps, assembla une armée sur la frontière, puis présenta au clergé et à la noblesse d’Écosse une requête formelle tendant à ce que, en sa qualité de seigneur suzerain du royaume, on le reconnût comme seul arbitre dans la compétition à la couronne et qu’on se soumît généralement à sa sentence.

Si mille querelles, mille contestations, qui allaient surgir de toutes parts, avaient permis aux grands d’Écosse d’envisager attentivement l’avenir, il est probable que d’une voix unanime ils eussent rejeté cette requête par une dénégation expresse du droit de suzeraineté que le roi d’Angleterre s’attribuait sur ses voisins, et qui, quoique réclamé souvent, d’une manière tantôt insidieuse et cachée, tantôt plus ouverte, avait été toujours combattu par les rois écossais. Oui, toujours ils avaient refusé de le reconnaître, si ce n’est après le traité de Falaise conclu en 1174, et par lequel le droit dont il s’agit fut réellement concédé jusqu’en 1189, époque où Richard Ie y renonça moyennant un retour pécuniaire. Mais, déchirés qu’ils étaient par cent partis, alors que douze compétiteurs se disputaient la couronne, les Écossais même les plus patriotes et les plus prudents semblent avoir cru qu’il valait mieux se soumettre à la décision d’un des plus sages et plus puissants monarques de l’Europe, au prix il est vrai d’une partie de leur indépendance, mais d’un sacrifice qu’ils pouvaient croire temporaire et presque nominal, qu’exposer le pays à la fois aux horreurs d’une guerre civile et aux armes de l’Angleterre.

Les barons écossais purent se rappeler aussi que tout récemment ils avaient été sur le point, par le traité de mariage entre le prince anglais de Galles et leur souveraine Marguerite, de mettre leur royaume sous la protection de l’Angleterre, démarche peu différente de celle que le monarque anglais proposait alors. La noblesse d’Écosse admit donc la requête d’Édouard, et accepta son arbitrage. Douze prétendants vinrent exposer leurs titres, et quoique Édouard lui-même prétendît avoir pour sa part droit au royaume comme à un fief qui retourne au suzerain, il ne le réclama cependant qu’avec une espèce de modération affectée. Sans aucun doute il servit mieux ses vues en ne distribuant que les cartes et en se contentant d’être l’arbitre du jeu, que s’il se fût