Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 5, 1838.djvu/373

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deux emprisonnés à cause de moi, par ordre du gouvernement. » — « Nous donnerons une caution, mon camarade ; le vieil André Ferrara[1] nous servira de répondant, et je voudrais qu’il justifiât de ses titres dans les salles de Westminster ! » — « Oh ! ils sont déjà en liberté, moyennant une caution moins militaire. » — « Alors, Édouard, pourquoi cet abattement ? Pensez-vous que les ministres de l’électeur soient assez simples pour mettre leurs ennemis en liberté dans ce moment critique, s’ils pouvaient, s’ils osaient les enfermer et les punir ? Soyez bien sûr, ou qu’ils manquent de motifs pour retenir vos parents plus long-temps en prison, ou, mieux encore, qu’ils redoutent nos amis, les braves cavaliers de la vieille Angleterre. Vous n’avez donc pas sujet de vous alarmer sur leur compte ; et nous aviserons au moyen de leur faire passer de vos nouvelles. »

Quoique peu satisfaisants, ces arguments réduisirent Édouard au silence. Il avait été plus d’une fois choqué du peu de sympathie que témoignait Fergus pour les sentiments de ceux même qu’il aimait, s’ils ne correspondaient aux siens du moment, et surtout s’il était contrarié dans un projet qu’il avait à cœur d’exécuter. Parfois Fergus s’apercevait bien qu’il avait offensé Waverley ; mais, visant toujours à un but, à une fin qui lui souriait, il ne songeait guère au chagrin plus ou moins long qu’il causait à Édouard, et la répétition de ces légères offenses avait un peu refroidi le vif attachement du volontaire pour son officier.

Le prince reçut Waverley avec son affabilité ordinaire et le complimenta fort de sa noble bravoure. Ensuite il le prit à part, lui fit plusieurs questions concernant le colonel Talbot et ses liaisons ; et quand il eut recueilli tous les renseignements qu’Édouard pouvait lui donner : « Monsieur Waverley, continua-t-il, puisque ce gentilhomme est si intimement lié avec votre digne et excellent ami sir Éverard Waverley, puisqu’il tient par sa femme à la famille Blandeville, dont le dévouement aux vrais et loyaux principes de

  1. Le nom d’André de Ferrara se trouve sur toutes les épées écossaises renommées pour leur bonne trempe. Quel était cet ouvrier, sa fortune, son époque ? c’est ce qui échappe encore aux recherches des antiquaires. Seulement on est porté à croire qu’André de Ferrara, armurier espagnol ou italien, fut amené par Jacques IV ou Jacques V en Écosse, pour apprendre aux habitants à fabriquer des armes. Les Écossais forgeaient des épées avec une grande perfection bien avant la bataille de Penkie ; et à cette époque l’historien Pasten dit qu’elles étaient larges et minces, presque toujours tranchantes, et de si bonne qualité, qu’il n’en a jamais vu d’aussi bonnes, et ne croit pas qu’on en puisse voir de meilleures. On peut remarquer que les véritables André Ferrara avaient une couronne sur la lame.