Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/243

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jusqu’à en être presque suffoqué, tant il avait besoin de se réchauffer, après avoir formé comme un cercle autour de sa tête, s’élevait vers la voûte sombre et inégale de la caverne : elle s’échappait par quelques fentes ou crevasses pratiquées dans le rocher ; c’est par là aussi sans doute que l’air pénétrait dans ce lieu, quand la marée était haute, époque où l’entrée du côté de la mer était envahie par les eaux.

« Je vous ai aussi apporté de quoi déjeuner, » dit Glossin en lui présentant quelques viandes froides et un flacon d’eau-de-vie. Hatteraick saisit le flacon avec vivacité, le porta à sa bouche, et, après avoir bu un large coup, s’écria avec transport : « Cela a bon goût… cela est excellent… rien de meilleur pour réchauffer un homme ! » puis il entonna un couplet d’une chanson allemande :

Avalons de la bière et force brandevin ;
Allons, brisons jusqu’aux fenêtres ;
Car je suis un franc libertin :
Tu l’es toi-même, c’est certain ;
En cela tous les deux nous sommes passés maîtres.

« Bien chanté, mon brave capitaine, » dit Glossin s’efforçant de prendre un ton jovial, et répondant par le couplet suivant :

Donnez-nous du gin[1] à pleins seaux ;
De vin versez-nous des rivières ;
Après nous viderons nos verres,
Et nous ne serons point si sots.
Nous sommes trois joyeux confrères ;
Toi, prends la terre, et moi les flots,
Tandis que Jack aura les crocs patibulaires.

« C’est cela, mon brave camarade. Vous voilà remis, je crois. Maintenant, parlons de nos affaires. — Vos affaires, s’il vous plaît ? répondit Hatteraick. Grêle et tonnerre ! les miennes sont faites depuis que je me suis échappé de la prison. — Un peu de patience, mon bon ami… je vous démontrerai que vos intérêts sont les mêmes que les miens. »

Hatteraick répondit par une espèce de toux sèche, et Glossin, après un moment de silence, reprit la parole.

Comment avez-vous laissé échapper l’enfant ? — Comment ? Malédiction et tonnerres ! je ne l’avais pas en garde. Le lieutenant Brown le donna à son cousin qui tenait à Middlebourg la maison Van Beest et Van Bruggen, et il lui fit je ne sais quel conte qu’il

  1. Eau-de-vie de genièvre, qui vient de Hollande. a. m.