Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/307

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trompe ? — Et que vous importe, encore une fois, monsieur ? » dit Bertram dont la surprise et le mécontentement redoublaient.

« Mais c’est que, dans ce cas, » répondit Glossin, remarquant que ses agents étaient à ses côtés ; « dans ce cas, je vous arrête au nom du roi. » En même temps il le prit au collet, pendant que deux des nouveaux venus le saisissaient chacun par un bras. Cependant, par un vigoureux effort, Bertram se débarrassa de leurs mains, et renversa à terre le plus opiniâtre ; tirant alors son couteau de chasse, il se mit sur la défensive. Les agresseurs, qui venaient de faire l’épreuve de sa vigueur, se retirèrent à une distance respectueuse. « Remarquez bien, leur dit-il, que je n’entends point résister à l’autorité légale ; justifiez-moi d’un mandat d’arrêt délivré par le magistrat, prouvez-moi que vous êtes autorisés à procéder à mon arrestation, et je me soumettrai sur-le-champ ; mais que celui qui tient à la vie ne m’approche pas avant qu’on m’ait appris pour quel délit et par quelle autorité on s’empare de ma personne. »

Glossin ordonna alors à un des constables d’exhiber un mandat d’arrêt contre Van Beest Brown, accusé d’avoir volontairement et méchamment tiré sur Charles Hazlewood, fils de sir Robert Hazlewood, dans l’intention de lui donner la mort, et de quelques autres crimes et délits ; ledit mandat ordonnant que, sitôt la capture, il serait traduit devant un magistrat pour être interrogé. Le mandat était positif, le fait impossible à nier ; Bertram baissa donc son coutelas, et se rendit aux constables, qui, se précipitant sur lui avec un empressement égal à la lâcheté qu’ils avaient montrée auparavant, se préparaient à le charger de fers, alléguant, pour justifier cette rigueur, la force et l’agilité qu’il venait de déployer. Mais le courage ou l’effronterie manqua à Glossin pour laisser commettre cet outrage inutile ; il ordonna que le prisonnier fût traité avec tous les égards, tout le respect compatibles avec la prudence. N’osant pas le laisser entrer dans la maison de ses pères, où d’autres objets auraient pu éveiller plus vivement encore ses souvenirs, et en même temps pour donner à ses procédés une sanction d’une autorité plus respectable que la sienne, il commanda qu’on préparât son équipage (car il en avait pris un depuis peu) ; en attendant il fit apporter des rafraîchissements au prisonnier et aux officiers, qu’il consigna dans un des appartements du vieux château, jusqu’à ce qu’on pût transporter l’accusé devant le magistrat qui devait procéder à son interrogatoire.