Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/334

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bon et du mauvais dans ces Égyptiens. S’ils ont commerce avec le diable, c’est leur affaire et non la nôtre… Quant à sa manière d’arranger un cadavre, je connais bien cela. Ces diables de contrebandiers, quand l’un d’eux est tué dans une affaire, envoient chercher une femme comme Meg pour ensevelir le corps, c’est là toute la pompe funèbre. Puis ils le jettent dans un trou, sans plus de cérémonie qu’on n’y jetterait un chien. Mais ils tiennent beaucoup à cette coutume. Quand ils sont près de mourir, il faut encore qu’une vieille femme vienne leur chanter des prières, des ballades et des charmes, comme ils disent, préférablement à un ministre… C’est une ancienne coutume parmi eux. Je croirais assez que l’homme qui mourut devant vous avait été blessé quand ils brûlèrent Woodbourne. — Mais, mon ami, Woodbourne n’est pas brûlé. — Eh bien ! tant mieux pour les maîtres. Le bruit avait couru chez nous qu’il n’y restait pas deux pierres l’une sur l’autre. Quoi qu’il en soit on s’y est battu, et joliment encore. Vous pouvez donc m’en croire, votre homme, comme je disais, avait été blessé dans le combat, et ce sont les Égyptiens qui ont pris votre porte-manteau quand ils ont trouvé la chaise de poste arrêtée sur la neige… Ils ne pouvaient passer sans le prendre… cela allait à leur main comme un goulot de bouteille. — Mais si cette femme est une reine chez eux, pourquoi n’a-t-elle pas pu me protéger ouvertement et me faire rendre ce qu’on m’avait pris ? — Ah ! qui sait ? Si elle a le droit de leur commander, ils ont, eux, celui de faire ce qui leur plaît, quand la tentation est grande ; peut-être aussi que quand il y a des contrebandiers avec eux, elle a moins d’autorité ; et il y en a presque toujours… J’ai entendu dire que les Égyptiens savent quand les contrebandiers doivent arriver, où ils doivent débarquer, mieux que ceux à qui ils vendent leurs marchandises. D’ailleurs, après tout, elle est un peu folle, elle a quelque chose d’extraordinaire dans la cervelle. Que ses prophéties, ses prédictions soient vraies ou fausses, pour sûr elle y croit elle-même, et dans sa conduite elle obéit toujours à quelque singulière inspiration. Elle ne prendra jamais le chemin le plus court pour aller à un puits, croyez-le bien… Mais quelle diable d’histoire que la vôtre, avec des ruines, des morts, des mourants ! Je n’en ai jamais lu de pareille dans nos livres de contes !… Mais chut ! j’entends venir le geôlier. »

En effet leur conversation fut interrompue par le bruit peu harmonieux des serrures et des verroux, et Mac-Guffog montrant sa grosse figure à la porte : « Allons, monsieur Dinmont, dit-il, pour