Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 8, 1838.djvu/381

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vent. Pour l’amour du ciel, venez à la Loge ! et examinons ce qu’il y a de mieux à faire. — Un instant, jeune fille ; laissez-moi le retirer du sentier ; il ne faut pas qu’il soit ainsi en vue de tout le monde… Ne m’aiderez-vous pas, mon enfant ? — Je ne le puis, Jocelin… Je ne toucherais pas un cheveu de sa tête pour tout Woodstock. — Il faut donc que je fasse cela tout seul, » dit Jocelin qui, quoique soldat et forestier, n’éprouvait pas moins beaucoup de répugnance à s’en charger. Les dernières paroles du mourant, et son regard, avaient produit une profonde impression de terreur sur l’âme assez peu sensible de Jocelin. Cependant il se résigna ; il retira feu Tomkins du sentier, et le cacha sous un buisson de ronces et d’épines, de manière à ce qu’on ne pût le voir. Il revint ensuite près de Phœbé, qui, pendant ce temps-là, était demeurée muette sous l’arbre dont la racine avait occasionné sa chute. — Retournons à la Loge, fille, et voyons un peu ce que nous pourrons dire sur cet accident… Sa mort est un malheur qui va terriblement augmenter notre péril… Mais que te voulait-il donc pour le fuir ainsi comme une folle ?… Mais je puis deviner… Philippe a toujours été un diable avec les demoiselles, et je pense, comme dit le docteur Rochecliffe, que, depuis qu’il s’était sanctifié, il avait dix diables au corps, pires que lui-même… C’est précisément ici l’endroit où je l’ai vu l’épée à la main, la lever contre le vieux chevalier, et lui, un enfant de charité !… C’était une haute trahison pour le moins… Mais, par ma foi, il l’a payé belle. — Mais, hélas ! Jocelin, comment avez-vous pu admettre à vos conseils un homme si pervers, et lui prêter la main dans tous ses complots pour effrayer ces messieurs les Têtes-rondes ? — Ma foi, voyez-vous, ma fille, à notre première rencontre il me sembla que je le connaissais, surtout, parce que Bévis, qu’on élevait ici quand il était piqueur, ne s’élançait pas sur lui ; et lorsque nous renouâmes notre vieille connaissance à la Loge, je m’aperçus qu’il entretenait une correspondance secrète avec le docteur Rochecliffe, qui était convaincu que c’était un partisan du roi, et restait, par conséquent, en bonne intelligence avec lui. Le docteur se vante d’avoir appris beaucoup de choses par lui ; je demande au ciel que lui, de son côté, il n’ait pas été aussi communicatif. — Ah ! Jocelin, vous n’eussiez jamais dû lui permettre de passer le seuil de la Loge ! — Il ne l’eût jamais passé, si j’avais su comment l’en empêcher… Mais quand il donna si franchement dans notre projet, et me dit comment je me devais habiller pour ressembler au comédien Robinson, dont l’esprit visitait Harrison…