Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 8, 1838.djvu/82

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puis avoir été l’un et l’autre dans mon temps, comme vous savez ; mais mille diables ! faut-il que je vous rappelle toujours notre mutuelle obligation de protection ? Notre ligue offensive et défensive, comme je peux l’appeler, devait s’exécuter sans avoir égard aux opinions politiques ou religieuses du parti protégé, sans qu’on fût tenu le moins du monde à se conformer à celles de son ami ? — C’est vrai, dit Éverard, mais à cette condition très nécessaire que l’on consentira à se conformer extérieurement aux circonstances, de manière à rendre le rôle de l’ami protecteur plus facile et moins dangereux. Eh bien ! vous violez sans cesse le traité, sans égard pour ma sûreté personnelle ni pour mon crédit. — Je vous dis, Mark, et je le dirais même à l’apôtre votre homonyme, que vous ne me rendez pas justice. On vous a prêché la sobriété et l’hypocrisie depuis le moment où vous portiez jupons jusqu’au jour où vous avez pris la soutane de Genève… depuis votre naissance jusqu’à présent enfin… c’est naturel chez vous ; et vous êtes surpris qu’un tapageur, un brave et honnête garçon, habitué toute sa vie à dire la vérité, et surtout en présence de la bouteille, ne puisse être un jeune homme aussi parfait que vous… Tudieu ! il n’y a pas égalité entre nous… Il en serait de même si un plongeur de profession, parce qu’il peut rester, sans inconvénient, dix minutes sans respirer, insultait un pauvre diable parce qu’il sentirait le besoin de sortir au bout de vingt secondes… Et après tout, à considérer depuis quand je travaille, je crois que je ne vais pas encore si mal… Essayez ! — A-t-on reçu d’autres nouvelles de la bataille de Worcester ? » demanda Éverard d’un ton si sérieux qu’il en imposa à son compagnon, qui répondit naïvement comme d’habitude. « De pires ! diable m’emporte, cent fois pires que toutes les autres !… déroute complète. Noll s’est très certainement vendu au diable, mais son bail finira un jour… C’est toute notre consolation pour le moment. — Comment ! et c’eût été là votre réponse au premier habit-rouge qui vous eût fait cette question ? dit Éverard. Par ma foi, on vous aurait au plus vite délivré un passeport pour le corps-de-garde le plus voisin. — Non, non, répliqua Wildrake, je croyais que vous m’adressiez vous-même la parole… Ouais ! en bien, voilà : Un grand merci… un glorieux merci… un meilleur, un magnifique, un inappréciable merci… vrai, les malveillants sont dispersés de Dan à Beersheba… ils ont été taillés en pièces jusqu’au coucher du soleil. — Avez-vous entendu parler des blessures du colonel Thornhaugh ? — Il est mort, c’est