Me consolerez-vous en vous désespérant ?
Des coups de la fortune êtes-vous le garant ?
Vous me plaignez ! Eh ! quoi ! ne peut-on vivre heureuse,
Si ce n’est au milieu d’une Cour orageuse ?
À l’égard de ce bien qui s’est évanoui,
Ne pouvant être à vous, en aurois-je joui ?
En effet, à quoi sert une opulence extrême,
Si l’on ne la partage avec ce que l’on aime ?
Je ne sens pas qu’on puisse en jouir autrement.
Vous l’avez bien fait voir.
Ma ruine fera le repos de ma vie.
Ma liberté me reste ; on l’auroit poursuivie.
L’autorité, contraire à nos vœux les plus doux,
M’auroit voulu forcer à prendre un autre époux.
Peut-être auriez-vous fait son bonheur & le vôtre.
Il dépendoit de vous ; je n’en connois point d’autre.
J’ignore si l’on peut aimer plus d’une fois :
Mais quand on s’est livrée sans réserve à son choix,
Il est bien dangereux de prendre d’autres chaînes.
Que l’on s’apprête un jour de tourmens & de peines !
Sait-on ce que l’on donne ? Est-on bien sûr d’un cœur,
Qu’on arrache de force à son premier vainqueur ?