Page:Œuvres mêlées 1865 III.djvu/122

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Comme cette paix étoit plutôt un triomphe pour lui qu’un accommodement, elle le rendit trop fier pour être de durée. Une heure avant que d’aller au palais Mazarin, j’y envoyai un valet de chambre que Mme la Comtesse m’avoit donné depuis que j’en étois sortie, et qui portoit mes hardes. M. Mazarin, qui le connoissoit comme moi, lui ayant demandé ce qu’il vouloit, et à qui il étoit, le congédia sans attendre seulement que je fusse arrivée. Ce valet me rencontra à deux cents pas du logis ; et quoique Mme la Comtesse, qui me conduisoit, vit bien que c’étoit une nouvelle occasion de brouillerie, elle se cortenta de m’exhorter à passer outre, me laissa au bas de l’escalier, et ne voulut point voir M. Mazarin, parce qu’il avoit fait tous ses efforts pour me faire mettre à l’hôtel de Conti, comme si je n’eusse pas été si bien à l’hôtel de Soissons. Je demandai d’abord grâce pour le valet chassé, et la nécessité où je me voyois réduite par l’autorité des puissances, me fit faire des soumissions que je n’aurois jamais espérées de la fierté de mon naturel ; mais ce fut inutilement. J’avois affaire à un homme qui vouloit profiter de la conjoncture ; et voyant qu’il ne me payoit que de mauvaises excuses, et de plus mauvaises plaisanteries, je me mis en devoir de le quitter pour me retirer chez mon frère une seconde fois. M. Mazarin qui, comme vous verrez, avoit pris ses mesures pour m’empêcher de sortir quand il me plairoit, et me faire une prison de mon palais, se jeta au-devant de moi, et me poussa fort rudement pour me fermer le passage ; mais la douleur me donnant des forces extraordinaires, je passai, malgré qu’il