Page:Œuvres mêlées 1865 III.djvu/272

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vous faire souvenir, en beaucoup d’endroits, de celui où j’ai été. Je ne parlerai point des avantages que j’avois, par modestie ; je me tairai des qualités de M. Mazarin, par discrétion : mais laissant au public à faire le jugement de nos personnes, je dirai hardiment que je n’ai contribué en rien à la dissipation des biens que je lui ai apportés, et que les moindres de ses domestiques en ont tiré de quoi s’enrichir, quand il m’a dénié les choses nécessaires simplement pour vivre.

J’ai demeuré plus que je ne devois, et aussi longtemps que j’ai pu, avec un mari qui m’étoit si opposé : à la fin, je me suis dégagée, par raison, d’un homme avec qui je m’étois laissée lier par obéissance. Un dégagement si juste m’a coûté ces biens qui ont fait tant de bruit dans le monde : mais la liberté ne coûte jamais trop cher à qui se délivre de la tyrannie. Quoi qu’il en soit, je me vis dépouillée de toutes choses. Je me vis sans aucun moyen de subsister, jusqu’à ce que le roi, par un principe de justice, me fit donner une pension, sans le consentement de M. Mazarin, que M. Mazarin m’a ôtée il y a dix ans, avec le consentement de Sa Majesté. Ce changement des bontés du roi ne doit point s’attribuer à celui de ma conduite, car je n’ai jamais entré en rien qui put lui déplaire. Mais il est difficile aux plus grands rois de bien