peut rapporter à trois mouvements principaux tout ce que nous fait sentir une passion si générale : aimer, brûler, languir. Aimer simplement, est le premier état de notre âme, lorsqu’elle s’émeut par l’impression de quelque objet agréable ; là, il se forme un sentiment secret de complaisance, en celui qui aime ; et cette complaisance devient ensuite un attachement à la personne qui est aimée. Brûler, est un état violent, sujet aux inquiétudes, aux peines, aux tourments, quelquefois aux troubles, aux transports, au désespoir ; en un mot, à tout ce qui nous inquiète ou qui nous agite. Languir, est le plus beau des mouvements de l’amour : c’est l’effet délicat d’une flamme pure qui nous consume doucement ; c’est une maladie chère et tendre qui nous fait haïr la pensée de notre guérison. On l’entretient secrètement au fond de son cœur, et, si elle vient à se découvrir, les yeux, le silence, un soupir qui nous échappe, une larme qui coule, malgré nous, l’expriment mieux que ne pourrait faire toute l’éloquence d’un discours. . . . . Une âme qui aime bien, ne se porte aux autres passions que selon qu’il plaît à son amour. Si elle a de la colère contre un amant, l’amour l’excite et l’apaise ; elle pense haïr et ne fait qu’aimer ; l’amour excuse l’ingratitude et justifie l’infidélité. Les tourments d’une véritable passion sont des plaisirs : on en connoît les peines lorsqu’elle est passée, comme après la rêverie d’une fièvre on en sent les douleurs. En aimant bien, l’on n’est jamais misérable ; on croit l’avoir été quand on n’aime plus. »
Dans cette analyse subtile, et pourtant vraie, Saint-Évremond se fût trouvé d’accord avec l’hô-