Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/237

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la continuation de leur amour pour les absents, est moins un honneur à leur constance qu’une honte à leur beauté. Ainsi, monsieur, que votre maîtresse en aime un autre, ou qu’elle vous aime encore, le bon sens vous la doit faire quitter, comme trompeuse ou comme méprisée. Cependant, en cas que vous voyiez quelque jour à la fin de votre disgrâce, vous ne devez pas en mettre à votre amour. Les courtes absences animent les passions, au lieu que les grandes les font mourir. » Plein de ces idées, il écrivoit à une dame dont il étoit épris, et qui pendant son absence étoit fort entourée, : « J’ai sujet de me louer de votre fermeté jusqu’ici : je doute néanmoins qu’une idée le puisse disputer longtemps contre un visage, et un souvenir contre des conversations. J’ai trop d’inquiétude, pour laisser plus longtemps l’avantage de la présence à ceux qui vous voyent. » Jamais, en effet, Saint-Évremond n’a été, sur ce point, dupe de son amour-propre.

La même surexcitation de galanterie et de politesse, se remarquoit dans toutes les classes de la société françoise, dans la société de la cour comme dans celle de la ville ; je ne dis pas noble et bourgeoise, car je manquerois d’exactitude. Racine étoit bourgeois, et Boileau de même, et Bossuet aussi. On ne les tenoit pas moins pour être de bonne compagnie. La belle-sœur de Bossuet étoit une femme charmante, correspondante de Bussy ; elle nous a laissé des lettres du meilleur goût. Mme Bourneau correspondoit avec Saint-Évremond et Racine, et vivoit chez les Comminges. Les assemblées bourgeoises de Mme Payen, près Notre-Dame, étoient fort recherchées, au dire de Loret (décembre 1652) :