Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/238

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on y donnoit de ravissants concerts. L’ensemble de ces sociétés, c’étoit le monde du dix-septième siècle.

Il admettoit en fait d’amour, des tolérances qui ne paroissoient point irrégulières. Les amours sincères de Louis XI Vont eu leur moment de faveur publique très-prononcée. Le jeune roi galant et amoureux, a été du goût des François, plus que l’époux de Marie-Thérèse d’Autriche, plus que n’avoit été Henri IV lui-même. Ses amours ont été célébrées et ont touché les contemporains. On se moque aujourd’hui des beaux sentiments étalés sur le théâtre du dix-septième siècle. Mais, alors, cet étalage étoit l’expression d’un sentiment général. On n’entendoit que ce langage, et c’étoit le propos courant de la société. Tout ce monde a été Céladon et s’en est fait honneur. Les prudes rigoristes n’imposoient même que la fidélité matérielle au devoir. Pour la liberté du cœur, elle n’etoit contestée par personne ; on se rappelle le mot de Mme de Montmorency : « Beaucoup de femmes sont vertueuses, de la ceinture en bas ; mais, de la ceinture en haut, qui peut en répondre ? » Pendant les quartiers d’hiver, la cour brillante de ces élégants seigneurs, si braves, si spirituels, tournoit la tête aux Parisiennes, qui se consoloient avec la ville, pendant la saison des batailles. Les poésies amoureuses de Racan, de Segrais, de la Suze, de Benserade ; les romans incroyables de Mlle de Scudéry, de la Calprenède, fascinoient les esprits. Pour l’honneur du goût, Mme de Lafayette fit révolution dans le roman, en ramenant la faveur aux tableaux purs de la nature et de la vérité. L’entraînement général avoit fait de la passion le grand ressort de la littérature. Le seul office qui restât au