Nous devons à Des Maizeaux une vie fort étendue de Saint-Évremond, laquelle satisfit peu les contemporains, si ce n’est Bayle à qui elle est adressée. « Elle m’a paru mauvaise, froide, allongée, dit Marais ; ce n’est pas là l’homme qu’il nous faut, pour parler du plus grand homme du monde. » Toutefois, malgré sa sécheresse et ses défauts, cette biographie est encore le document le plus important que nous ayons sur l’histoire de Saint-Évremond. Des Maizeaux a puisé à d’excellentes sources ; il est véridique et sincère ; c’est à nous de compléter ce qui lui manque, en profitant des utiles matériaux qu’il nous a laissés : bien heureux de l’avoir pour guide, car Saint-Évremond n’a point laissé de Mémoires, quoique ce fût assez l’habitude des personnes de sa condition et de son temps, qui avoient joué un rôle dans le monde. Mais il n’avoit, disoit-il, pas de mystères politiques à révéler, et pas la moindre vanité d’entretenir les hommes de sa personne ou de ses affaires.
La famille qui lui donna le jour étoit une vieille et bonne race normande, aujourd’hui éteinte ; illustre au dix-septième siècle, par le rang, les emplois et les alliances. Elle étoit connue dans le monde, sous le nom de Saint-Denis, qu’elle avoit reçu de la châtellenie ou baronnie de Saint-Denis-le-Guast, située à trois lieues de Coutances, dans la basse Normandie, et dont elle avoit hérité des Martel-Bacqueville, qui la possédoient depuis le quatorzième siècle. Son nom patronymique étoit celui de Marguetel, qu’on écrit quelquefois Margastel, Margotelle ou le Marquetel, et qu’avoient porté avec honneur ses aïeux les plus reculés ; ce nom est inscrit, au trei-