Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/279

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

son d’Effiat sollicita un édit, pour empêcher le mariage des deux passionnés ; on appeloit déjà Marion : Madame la Grande. Telle est l’origine de l’ordonnance de 1639 contre les mariages clandestins. Peu de temps avant la catastrophe de Cinq-Mars, Richelieu eut fantaisie de Marion, qui se donna le plaisir de la coquetterie avec le cardinal, lequel la reçut plusieurs fois, déguisée en courrier. Il avoit pris goût au jeu, mais il n’est pas sûr qu’il l’ait conduit à fin heureuse. Marion ne se donnoit que selon son cœur, et Richelieu avoit 50 ans. Elle fut moins cruelle avec le beau duc de Châtillon, qui passa d’elle à Ninon, de Ninon à Mlle de Guerchi, de celle-ci à une épouse qui lui rendit avec usure ses galanteries ; il fut tué au combat du faubourg Saint-Antoine. Avant ou après Chàtillon, figurèrent, parmi les amants de Marion, le surintendant d’Emery, dont elle reçut les splendides générosités, et enfin ce pauvre Brissac, le héros de cette immortelle aventure du chevalier de Grammont, racontée avec tant d’esprit par Hamilton.

Telle est la liste donnée par Tallemant et, selon lui, avouée par Marion elle-même. Il n’y a pas, en vérité, de quoi se récrier ; mais, sans désobligeance, on peut la croire incomplète, et une érudition inexorable devroit y ajouter quelques noms ; sans parler des éclats de colère de mécontents mal élevés, tels que le maréchal de la Meilleraye. Pour ne citer qu’un exemple d’omission, il est impossible de ne pas joindre au catalogue le nom de Saint-Évremond. Homme discret, entre tous, s’il a laissé croire à ses succès auprès de Marion, on peut s’en tenir