Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/503

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moins de temps à pratiquer les choses, j’ai moins de curiosité pour les apprendre. J’ai plus de besoin du fond de la vie que de la manière de vivre ; et le peu que j’en ai s’entretient mieux par des agréments que par des instructions. Les livres latins m’en fournissent le plus, et je relis mille fois ce que j’y trouve de beau, sans m’en dégoûter.

Un choix délicat me réduit à peu de livres, où je cherche beaucoup plus le bon esprit que le bel esprit ; et le bon goût, pour me servir de la façon de parler des Espagnols, se rencontre ordinairement dans les écrits des personnes considérables. J’aime à connoître, dans les épîtres de Cicéron, et son caractère, et celui des gens de qualité qui lui écrivent. Pour lui, il ne se défait jamais de son art de rhétorique ; et la moindre recommandation qu’il fait au meilleur de ses amis, s’insinue aussi artificieusement que s’il vouloit gagner l’esprit d’un inconnu, pour la plus grande affaire du monde. Les lettres des autres n’ont pas la finesse de ces détours : mais, à mon avis, il y a plus de bon sens que dans les siennes ; et c’est ce qui me fait juger le plus avantageusement de la grande et générale capacité des Romains de ce temps-là.

Nos auteurs font toujours valoir le siècle d’Auguste, par la considération de Virgile et d’Horace ; et peut-être plus par celle de Mécé-