Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/525

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de leurs sujets. On parle toujours aux princes de la valeur, qui ne fait que détruire, et de la libéralité, qui ne fait que dissiper, si la justice ne les a réglées. Il est vrai qu’il faut appliquer, pour ainsi dire, l’enseignement de chaque vertu au besoin de chaque naturel ; inspirer la libéralité aux avares, animer du désir de la gloire ceux qui aiment le repos, et retenir, autant qu’on peut, les ambitieux dans la règle de la justice. Mais, quelque diversité qui se trouve dans leurs génies, la justice est toujours la plus nécessaire ; car elle maintient l’ordre, en celui qui la fait, aussi bien qu’en ceux à qui elle est rendue. Ce n’est point une contrainte, qui limite le pouvoir du prince, puisqu’en la rendant à autrui, il apprend à se la rendre à lui-même, et qu’il se la fait volontairement, quand nous la recevons de lui nécessairement, par sa puissance.

Je ne vois point de prince, dans l’histoire, qui ait été mieux instruit que le grand Cyrus. On ne se contentoit pas de lui enseigner exactement tout ce qui regardoit la justice ; on lui en faisoit pratiquer les leçons, sur chaque chose qui se présentoit. De sorte qu’en même temps on imprimoit, dans son esprit, la science de la justice, et on formoit, dans son âme, l’habitude d’être juste. L’institution d’Alexandre eut quelque chose de trop vaste : on lui fit tout con-