Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/131

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sujétion. Voilà quel fut alors le génie du peuple Romain.

Il faut maintenant parler de celui de Tibère, et faire voir l’esprit qu’il porta au gouvernement de l’empire. Son dessein le plus caché, mais le mieux suivi, fut de changer toutes les maximes d’Auguste. Celui-ci devenu empereur, donnoit au bien général toutes ses pensées. D’une politique si juste et si prudente, Tibère fit une science de cabinet, où étoit renfermé un faux et mystérieux intérêt du prince, séparé de l’intérêt de l’État, et presque toujours opposé au bien public.

Le bon sens, la capacité, le secret, furent changés en finesse, en artifice, en dissimulation. On ne connoissoit plus les bonnes et les mauvaises actions par elles-mêmes : tout étoit pris selon les délicates intentions de l’empereur, ou se jugeoit par le raffinement de quelque spéculation malicieuse.

Le crédit qu’eut Germanicus d’apaiser les légions, fut d’un service fort avantageux, et peu de temps agréable. Quand le danger fut passé, on fit réflexion qu’il pourroit tirer les troupes de leur devoir, puisqu’il avoit su les y remettre. En vain il fut fidèle à Tibère ; sa modération à refuser l’empire, ne le fit pas trouver innocent : on le jugea coupable de ce qui lui avoit été offert ; et tant d’artifices fu-