Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/205

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Mais il en revenoit encore une autre utilité à la république ; c’est que les magistrats se faisoient connoître pleinement eux-mêmes ; car il étoit impossible que dans ces fonctions différentes, le naturel le plus profond put également se cacher partout, et que les bonnes et les mauvaises qualités ne fussent à la fin discernées. On découvroit en ces génies bornés que la nature a restreints à certains talents, qu’une humeur douce et paisible qui s’étoit accommodée au ministère de la religion, n’avoit pas quelquefois assez de confiance, pour maintenir les lois en vigueur.

On voyoit quelquefois un sénateur, incorruptible dans les jugements, qui n’avoit ni l’activité, ni la vigilance d’un bon capitaine. Tel étoit un grand homme de guerre, comme Marius, qui se trouvoit sans capacité, en ce qui regardoit la religion et les affaires. À la vérité, il se formoit souvent une suffisance générale, et une vertu pleine partout, qui pouvoit rendre les citoyens utiles au public en toutes choses ; mais souvent aussi une capacité moins étendue faisoit employer les hommes à certains usages où ils étoient seulement propres.

C’est ce qu’on a vu dans le consulat de Cicéron et d’Antonius, où ce premier eut ordre de veiller au salut de la république, selon son talent ; et le second fut envoyé assembler des