Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/393

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La langueur ordinaire où je tombe aux Opéras, vient de ce que je n’en ai jamais vu qui ne m’ait paru méprisable, dans la disposition du sujet et dans les vers. Or, c’est vainement que l’oreille est flattée et que les yeux sont charmés, si l’esprit ne se trouve pas satisfait. Mon âme, d’intelligence avec mon esprit plus qu’avec mes sens, forme une résistance secrète aux impressions qu’elle peut recevoir, ou pour le moins elle manque d’y prêter un consentement agréable, sans lequel les objets les plus voluptueux même ne sauroient me donner un grand plaisir. Une sottise chargée de musique, de danses, de machines, de décorations, est une sottise magnifique, mais toujours sottise ; c’est un vilain fonds, sous de beaux dehors, où je pénètre avec beaucoup de desagrément.

Il y a une autre chose, dans les Opéras, tellement contre la nature, que mon imagination en est blessée : c’est de faire chanter toute la pièce depuis le commencement jusqu’à la fin, comme si les personnes qu’on représente s’étoient ridiculement ajustées pour traiter en musique et les plus communes et les plus importantes affaires de leur vie. Peut-on s’imaginer qu’un maître appelle son valet, ou qu’il lui donne une commission, en chantant ; qu’un ami fasse, en chantant, une confidence à son