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Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/394

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ami ; qu’on délibère, en chantant, dans un conseil ; qu’on exprime avec du chant les ordres qu’on donne, et que mélodieusement on tue les hommes à coups d’épée et de javelot, dans un combat ? C’est perdre l’esprit de la représentation, qui sans doute est préférable à celui de l’harmonie ; car celui de l’harmonie ne doit être qu’un simple accompagnement ; et les grands maîtres du théâtre l’ont ajoutée comme agréable, non pas comme nécessaire, après avoir réglé tout ce qui regarde le sujet et le discours. Cependant l’idée du musicien va devant celle du héros, dans les Opéras ; c’est Luigi, c’est Cavalli, c’est Cesti3, qui se présentent à l’imagination. L’esprit ne pouvant concevoir un héros qui chante, s’attache à celui qui le fait chanter ; et on ne sauroit nier qu’aux représentations du Palais-Royal, on ne songe cent fois plus à Lulli, qu’à Thésée ni à Cadmus.

Je ne prétends pas néanmoins donner l’exclusion à toute sorte de chant, sur le théâtre. Il y a des choses qui doivent être chantées ; il y en a qui peuvent l’être, sans choquer la bien-


3. Ces compositeurs avoient été appelés en France, par le cardinal Mazarin, dès l’année 1647. Voy. Planelli, dell’ Opera in musica, Naples, 1772 ; Fetis, Biogr. univers. des musiciens, Paris, 1860 ; et Sutherland, hist. de l’Opéra (en anglais), 1861, 2 vol. in-8º.