Aller au contenu

Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/94

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

son propre pays, à mesure qu’Alexandre en possédoit les richesses. Scipion, dont je viens de parler, fit la guerre en Espagne et en Afrique, avec des légions que la république avoit levées et qu’elle faisoit subsister. César eut les mêmes commodités, pour la conquête des Gaules, et il se servit des forces et de l’argent de la république, même pour l’assujettir.

Pour notre Annibal, il avoit joint à un petit corps de Carthaginois plusieurs nations, qu’il sut lier toutes par lui-même, et dont il put se faire obéir, dans une éternelle nécessité. Ce qui est encore plus extraordinaire, les combats ne le mettoient guère plus à son aise : il se trouvoit presque aussi embarrassé après le gain d’une bataille qu’auparavant. Mais s’il a eu des talents que les autres n’avoient pas, aussi a-t-il fait une faute, où apparemment ils ne seroient pas tombés.

Alexandre étoit si éloigné de laisser les choses imparfaites, qu’il alloit toujours au delà, lorsqu’elles étoient consommées. Il ne se contenta pas d’assujettir ce grand empire de Darius, jusqu’à la moindre province. Son ambition le porta aux Indes, quand il pouvoit accommoder la gloire et le repos, ce qui est rare, et jouir paisiblement de ses conquêtes. Scipion ne songea pas à se reposer, qu’il n’eût réduit Carthage, et établi en Afrique les affaires