Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/93

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à prendre ses avantages, soit à disposer son armée, soit à donner les ordres dans le combat : mais enfin le génie de Rome l’emporta sur celui de Carthage, et la défaite des Carthaginois laissa pour jamais l’empire aux Romains.

Quant au général, il fut admiré de Scipion, qui, au milieu de sa gloire, sembloit porter envie à la capacité du vaincu ; et le vaincu, dont l’humeur étoit assez éloignée de vaines ostentations, crut toujours avoir quelque supériorité dans la science de la guerre : car, discourant un jour des grands capitaines avec Scipion, il mit Alexandre le premier, Pyrrhus le second, et lui-même le troisième ; à quoi répondit froidement Scipion : Si vous m’aviez vaincu, en quel rang vous seriez-vous mis ?Le premier de tous, reprit Annibal.

Il est certain qu’il avoit une merveilleuse capacité dans la guerre ; et ces conquérants illustres, qui ont laissé un si grand nom à la postérité, n’approchoient pas de son industrie, et pour assembler, et pour maintenir des armées.

Alexandre passa en Asie, avec des Macédoniens qui obéissoient à leur roi. S’il avoit peu d’argent et peu de vivres, les batailles qu’il gagnoit le mettoient dans l’abondance de toutes choses. Une ville prise ou rendue lui livroit les trésors de Darius, qui devenoit nécessiteux en