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Page:Œuvres philosophiques de Leibniz, Alcan, 1900, tome 1.djvu/666

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choses. Il n’y a point de tel passage ; et c’est ici où les transformations de MM. Swammerdam, Malpighi et Leewenhoeck, qui sont des plus excellents observateurs de notre temps, sont venues à mon secours et m’ont fait admettre plus aisément que l’animal et toute autre substance organisée, ne commence point lorsque nous le croyons, et que sa génération apparente n’est qu’un développement, et une espèce d’augmentation. Aussi ai-je remarqué que l’auteur de la Recherche de la vérité, M. Regis, M. Hartsoeker et d’autres habiles hommes, n’ont pas été fort éloignés de ce sentiment.

7. Mais il restait encore la plus grande question de ce que ces âmes ou ces formes deviennent par la mort de l’animal, ou par la destruction de l’individu de la substance organisée. Et c’est ce qui embarrasse le plus ; d’autant qu’il paraît peu raisonnable que les âmes restent inutilement dans un chaos de matière confuse. Cela m’a fait juger enfin qu’il n’y avait qu’un seul parti raisonnable à prendre ; et c’est celui de la conservation non seulement de l’âme, mais encore de l’animal même et de sa machine organique ; quoique la destruction des parties grossières l’ait réduit à une petitesse qui n’échappe pas moins à nos sens que celle où il était avant que de naître. Aussi n’y a-t-il personne qui puisse bien marquer le véritable temps de la mort, laquelle peut passer longtemps pour une simple suspension des actions notables, et dans le fond n’est jamais autre chose dans les simples animaux : témoin les ressuscitations des mouches noyées et puis ensevelies sous de la craie pulvérisée, et plusieurs exemples semblables qui font assez connaître qu’il y aurait bien d’autres ressuscitations, et de bien plus loin si les hommes étaient en état de remettre la machine. Et il y a de l’apparence que c’est de quelque chose d’approchant que le grand Démocrite a parlé, tout atomiste qu’il était, quoique Pline s’en moque. Il est donc naturel que l’animal ayant toujours été vivant et organisé (comme des personnes de grande pénétration commencent à le reconnaître) il le demeure aussi toujours. Et puisque ainsi il n’y a point de première naissance ni de génération entièrement nouvelle de l’animal, il s’ensuit qu’il n’y en aura point d’extinction finale, ni de mort entière prise à la rigueur métaphysique ; et que par conséquent, au lieu de la transmigration des âmes, il n’y qu’une transformation d’un même animal, selon que les organes sont pliés différemment, et plus ou moins développés.

8. Cependant les âmes raisonnables suivent des lois bien plus