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Page:Œuvres philosophiques de Leibniz, Alcan, 1900, tome 1.djvu/778

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17. À l’égard des miracles, il ne s’agit pas de savoir ce que les théologiens ou les philosophes disent communément sur cette matière, mais sur quelles raisons ils appuient leurs sentiments. Si un miracle est toujours une action qui surpasse la puissance de toutes les créatures, il s’ensuivra que si un homme marche sur l’eau, et si le mouvement du soleil (ou de la terre) est arrêté, ce ne sera point un miracle, puisque ces deux choses se peuvent faire sans l’intervention d’une puissance infinie. Si un corps se ment autour d’un centre dans le vide, et si ce mouvement est une chose ordinaire, comme celui des planètes autour du soleil, ce ne sera point un miracle, soit que Dieu lui-même produise ce mouvement immédiatement, ou qu’il soit produit par quelque créature. Mais si ce mouvement autour d’un centre est rare et extraordinaire, comme serait celui d’un corps pesant, suspendu dans l’air, ce sera également un miracle ; soit que Dieu même produise ce mouvement, ou qu’il soit produit par une créature invisible. Enfin, si tout ce qui n’est pas l’effet des forces naturelles des corps, et qu’on ne saurait expliquer par ces forces, est un miracle, il s’ensuivra que tous les mouvements des animaux sont des miracles. Ce qui semble prouver démonstrativement que le savant auteur a une fausse idée de la nature du miracle.


Quatrième écrit de M. Leibniz, ou réponse à la troisième réplique de M. Clarke.

1. Dans les choses indifférentes absolument, il n’y a point de choix, et par conséquent point d’élection ni de volonté ; puisque le choix doit avoir quelque raison ou principe.

2. Une simple volonté sans aucun motif (a mere will) est une fiction non seulement contraire à la perfection de Dieu, mais encore chimérique, contradictoire, incompatible avec la définition de la volonté, et assez réfutée dans la Théodicée.

3. Il est indifférent de ranger trois corps égaux et en tout semblables, en quel ordre qu’on voudra ; et par conséquent ils ne seront jamais rangés par celui qui ne fait rien qu’avec sagesse. Mais aussi, étant l’auteur des choses, il n’en produira point, et par conséquent il n’y en a point dans la nature.

4. Il n’y a point deux individus indiscernables. Un gentilhomme d’esprit de mes amis, en parlant avec moi en présence de Mme l’Électrice, dans le jardin de Herrenhausen, crut qu’il trouverait bien deux