Page:Œuvres philosophiques de Leibniz, Alcan, 1900, tome 1.djvu/807

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temps et de l’espace fera bien juger que l’un est aussi idéal que l’autre. Cependant, si en disant que la duration d’une chose est éternelle, on entend seulement que la chose dure éternellement, je n’ai rien à y redire.

50. Si la réalité de l’espace et du temps est nécessaire pour l’immensité et l’éternité de Dieu ; s’il faut que Dieu soit dans des espaces ; si être dans l’espace est une propriété de Dieu ; Dieu sera en quelque façon dépendant du temps et de l’espace, et il en aura besoin. Car l’échappatoire que l’espace et le temps sont en Dieu, et comme des propriétés de Dieu, est déjà fermée. Pourrait-on supporter l’opinion qui soutiendrait que les corps se promènent dans les parties de l’essence divine ?

Sur les §§ 11 et 12.

51. Comme j’avais objecté que l’espace a des parties, on cherche une autre échappatoire en s’éloignant du sens reçu des termes, et soutenant que l’espace n’a point de parties ; parce que ses parties ne sont point séparables, et ne sauraient être éloignées les unes des autres par discerption. Mais il suffit que l’espace ait des parties, soit que ces parties soient séparables ou non ; et on les peut assigner dans l’espace, soit par les corps qui y sont, soit par les lignes ou surfaces qu’on y peut mener.

Sur le § 13.

52. Pour prouver que l’espace, sans les corps, est quelque réalité absolue, on m’avait objecté que l’univers matériel fini se pourrait promener dans l’espace. J’ai répondu qu’il ne paraît point raisonnable que l’univers matériel soit fini ; et quand on le supposerait, il est déraisonnable qu’il ait du mouvement, autrement qu’en tant que ses parties changent de situation entre elles ; parce qu’un tel mouvement ne produirait aucun changement observable, et serait sans but. Autre chose est quand ses parties changent de situation entre elles ; car alors on y reconnaît un mouvement dans l’espace, mais consistant dans l’ordre des rapports, qui sont changés. On réplique maintenant que la vérité du mouvement est indépendante de l’observation, et qu’un vaisseau peut avancer sans que celui qui est dedans s’en aperçoive. Je réponds que le mouvement est indépendant de l’observation ; mais qu’il n’est point indépendant de l’ob-