Page:Œuvres philosophiques de Leibniz, Alcan, 1900, tome 1.djvu/838

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la matière est la même ; mais la force dont nous parlons ici est la force active, impulsive et relative, qui est toujours proportionnée à la quantité du mouvement relatif. C’est ce qui paraît constamment par l’expérience, à moins que l’on ne tombe dans quelque erreur faute de bien supputer et de déduire la force contraire, qui nait de la résistance que les fluides font au corps, de quelque manière que ceux-ci se puissent mouvoir, et de l’action contraire et continuelle de la gravitation sur les corps jetés en haut.

100, 101, 102. J’ai fait voir, dans la dernière section, que la force active, selon la définition que j’en ai donnée, diminue continuellement et naturellement dans le monde matériel. Il est évident que ce n’est pas un défaut, parce que ce n’est qu’une suite de l’inactivité de la matière. Car cette inactivité est non seulement la cause, comme l’auteur le remarque, de la diminution de la vitesse, à mesure que la quantité de la matière augmente (ce qui à la vérité n’est point une diminution de la quantité du mouvement) ; mais elle est aussi la cause pourquoi des corps solides, parfaitement durs et sans ressort, se rencontrant avec des forces égales et contraires, perdent tout leur mouvement et toute leur force active, comme je l’ai montré ei-dessus ; et par conséquent ils ont besoin de quelque autre cause pour recevoir un nouveau mouvement.

103. J’ai fait voir amplement, dans mes écrits précédents, qu’il n’y a aucun défaut dans les choses dont on parle ici. Car pourquoi Dieu n’aurait-il pas eu la liberté de faire un monde, qui continuerait dans l’état où il est présentement, aussi longtemps ou aussi peu de temps qu’il le jugerait à propos, et qui serait ensuite changé, et recevrait telle forme qu’il voudrait lui donner, par un changement sage et convenable, mais qui peut-être serait tout à fait au-dessus des lois du mécanisme ? L’auteur soutient que l’univers ne peut diminuer en perfection : qu’il-n’y a aucune raison qui puisse borner la quantité de la matière ; que les percerions de Dieu l’obligent à produire toujours autant de matière qu’il lui est possible ; et qu’un monde borné est une fiction impraticable. J’ai inféré de cette doctrine que le monde doit être nécessairement infini et éternel ; c’est aux savants à juger si cette conséquence est bien fondée.

104. L’auteur dit à présent que l’espace n’est pas un ordre ou une situation, mais un ordre de situations. Ce qui n’empêche pas que la même objection ne subsiste toujours : savoir, qu’un ordre de situations n’est pas une quantité, connue l’espace l’est. L’auteur renvoie