Page:Œuvres poétiques de François de Maynard, 1885, tome 1.djvu/317

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Et (ô jaloux penser) possible dedans l’eau
De sa douce Cipris estaint la flame ardante
De l’amoureux desir ô rage violante !
O malheur ! ha ! Berger si je te puis tenir,
Slvandre trop heureux, ha ! triste souvenir,
Silvandre possesseur, ha ! cruelle parole,
Possesseur, est-il vray ? ha ! ce penser m’affole,
Quoy que ce fort, Silvandre amoureux du bel œil
Idole de mon ame et subject de mon dueil,
Si je te puis tenir emmy ces forests sombres,
Tu yras courtiser quelque autre soubs les ombres,
Des Mithes d’Elisée. Ha ! en combien de parts
Tes membres deschire ; de çà de là espars,
Seront par moy tirez ? Tes cris ny tes prieres
Ne sçauroient adoucir les violances fieres
Du mal que tu me fais en moissonnant le fruit
Que pour moy seulement Amour avoir produit.
Mais c’est trop retardé, le dueil qui me possede,
Fors qu’au point de sa mort, n’a de plus doux remede.
Allons, cherchons, courons. pour atraper celuy
Dont l’injuste bonheur rangrege mon ennuy :
Que le jour plus luisant que l’horreur des tenebres
Ne donne aucun relache à mes plaintes funebres,
Du repos ! mon ame, et de treve à mon mal,
Jusqu’à ce que je trouve (ha ! souvenir fatal)
Ce Berger qui me tue : alors la fiere rage
Qui me ronge le cœur, qui me lime et saccage,
Cedera au repos d’un paisible sommeil,
Apres avoir vaincu par Amour le Soleil