Page:Œuvres poétiques de François de Maynard, 1885, tome 1.djvu/74

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Mais je m’essuye aux rais de cet astre vainqueur,
Par qui ma liberté doucement fut seduite.

Vivre, aymer et languir me plait esgalement,
Car un si beau soleil va mon ame allumant,
Que vivre sans l’aymer ce ne seroit point vivre.

Puis que loin de son jour ce n’est qu’obscurité ;
Aussi pour ce flambeau je veux ma pointe future,
Et d’un nœud eternel lier ma liberté.

V.

Mon jour d’un pied glissant incline vers le soir,
Je m’aduance à la mort, mais en si beau servage
Qu’il faudrait moins d’amour pour fuir ce naufrage,
Ou un astre moins beau ou vivre sans espoir.

Amour si doucement maistrise mon vouloir,
Que je cingle tousiours plus j’oy bruire l’orage,
Et le trespas ne peut refroidir mon courage,
Car je crois que je meurs seulement par devoir.

Si mon desir fait bris contre l’amoureux Syrthe,
Mon funeste Cypres se change en vit beau Mirthe,
Ma perte en un doux gain, mon naufrage en un port :

Et la nuit de ma vie est le jour de ma gloire ;
Car mon nom consacré au temple de memoire
Par l’ame de l’honneur me ravivera mort.