qui, ayant, comme David, abattu tous ses voisins, lui laissa un trône affermi, qu’il était facile de conserver au milieu des délices de la paix. Si son fils Soliman eût ressemblé à son père, et non à son aïeul, cet empire se fût écroulé. Mais ce prince semble aujourd’hui vouloir surpasser la gloire même de son aïeul.
Je dirai donc, en m’appuyant sur ces exemples, qu’après un prince d’un grand caractère, un prince faible peut régner encore ; mais après un règne sans vigueur, un autre règne semblable ne peut subsister longtemps, à moins que de tels États, comme le royaume de France, ne soient soutenus par leurs anciennes institutions. Et j’appelle princes faibles ceux qui négligent les arts de la guerre.
Je conclus que le génie guerrier de Romulus conserva une assez longue influence pour permettre à Numa Pompilius de plier, pendant un grand nombre d’années, le peuple romain aux arts de la paix. Après lui régna Tullus, dont le caractère belliqueux rappela le souvenir de Romulus. Son successeur Ancus fut si heureusement traité par la nature, qu’il excellait également et dans la paix et dans la guerre. Il essaya d’abord de rester en paix avec ses voisins ; mais, ayant bientôt connu qu’ils le regardaient comme un prince efféminé, et paraissaient mépriser sa faiblesse, il vit que, s’il voulait maintenir Rome, il fallait se livrer à la guerre, et ressembler à Romulus plutôt qu’à Numa.
Que cet exemple éclaire tous les souverains qui occupent un trône. S’ils ressemblent à Numa, ils le conserveront ou le perdront selon les temps ou les caprices de la fortune ; mais, s’ils ressemblent à Romulus, dont la prudence et le courage dirigèrent toujours les armes, ils sont assurés de le conserver malgré tous leurs ennemis, à moins qu’une force opiniâtre et invincible ne parvienne à les en précipiter. Il est évident que si le sort eût donné à Rome, pour son troisième roi, un homme dont les