soldats obligés de se présenter pour ainsi dire isolément, courraient plus de dangers qu’anciennement, s’il s’agissait de prendre une ville, d’escalader ou de former d’autres attaques semblables, où ils ne pourraient se présenter en masse. Il est encore vrai que les officiers et les généraux d’une armée sont plus exposés qu’autrefois au danger de la mort, parce que le canon peut les atteindre en tout lieu, et qu’il ne leur sert à rien d’être placés au dernier rang et entourés de l’élite de leurs troupes. Cependant il est rare que l’un ou l’autre de ces deux dangers produise des dommages extraordinaires ; car on n’escalade point une ville bien fortifiée, et ce n’est point par des attaques insignifiantes que l’on peut l’emporter d’assaut ; mais si l’on veut s’en rendre maître, on en forme régulièrement le siége, comme le faisaient autrefois les anciens. Et dans les places mêmes qu’on emporte d’assaut, les dangers ne sont pas beaucoup plus grands qu’ils ne l’étaient alors. Ceux qui, dans ces temps, défendaient une ville, ne manquaient pas non plus de machines de trait, dont les effets, s’ils étaient moins terribles, n’en atteignaient pas moins leur but, celui de tuer les hommes.
Quant au danger de périr, auquel sont exposés les généraux ou les condottieri, durant les vingt-quatre ans qu’ont duré les dernières guerres d’Italie on en a vu moins d’exemples que durant l’espace de dix ans chez les anciens. En effet, à l’exception du comte Lodovico de la Mirandola, qui fut tué à Ferrare lorsque les Vénitiens attaquèrent cet État il y a quelques années, et du duc de Nemours, qui périt depuis à la Cerignuola, je ne connais pas d’exemple de généraux qu’ait fait mourir le canon ; car monseigneur de Foix fut tué à Ravenne par le fer et non d’un coup de feu.
Par conséquent, si les hommes ne font plus de preuves particulières de courage, ce n’est point à l’artillerie qu’il faut l’attribuer, mais au déplorable système de