Page:A. Belot - Les Stations de l’Amour.djvu/80

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lui répondis tout bas : « Eh bien ! oui, là !… »

— Qui est-ce, dis, Cile ?… Dis-le-moi, je ne le répéterai pas ?…

— Eh bien ! c’est… c’est Thérèse… quelquefois… Là, es-tu contente ?…

— Thérèse !… oh ! mais c’est vrai qu’elle est jolie et bien faite… je n’y avais pas fait attention… alors, c’est elle qui est ta petite gougnotte ?…

— Comment ! tu connais ce mot là ?… Mais qui donc t’a appris toutes ces choses ?… Quand as-tu commencé ?…

— C’est l’année passée, avec Madeleine de Sercey, cette petite brune frisée qui s’est mariée l’été dernier ; oh ! qu’elle était amoureuse ! J’étais son amie. Il faut te dire qu’à la pension, chacune des grandes a une bonne amie, généralement plus jeune qu’elle, avec qui elle fait toutes sortes de choses, et qu’elle aime comme un homme aime une femme. Depuis la rentrée, je suis l’amie de Louise Tardival, mais nous nous partageons la petite Palmyre Léontel, une créole de la Martinique qui n’a que treize ans et demi, mais qui a déjà des nichons plus gros que les miens et qui est cochonne comme tout. Ah ! elle en sait, celle-là !…

— De sorte que c’est Madeleine de Sercey qui t’a appris toutes ces polissonneries et ces vilains mots que tu dis couramment ?

— Oui, elle et mademoiselle Kerthe, la sou-maîtresse, cette jolie blonde qui a l’air si sainte nitouche.

— La sous-maîtresse ?…

— Oui, elle est joliment gentille, et très instruite !… Elle nous a eues presque toutes ; mais, toutes les trois, nous sommes ses favorites.

— Et c’est toujours avec le doigt ?…

Ma sœur rougit, et machinalement avança sa petite langue rose, en me disant : « Et puis avec ça aussi. »

— Avec la langue à la place du doigt ?…

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