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LA BELLE ALSACIENNE


bonne opinion pour ne pas s’en rapporter à la nature.

Depuis quelque temps, ma mère, fatiguée des plaisirs du monde, commençait à souhaiter un peu de repos ; mais elle ne voulait pas s’y livrer sans m’avoir fait recevoir en survivance.

Me voilà parvenue à ma treizième année, il est temps de paraître : je vais entrer en lice à sa place, dans la carrière galante.

Quoique dans un âge où les passions ne font qu’effleurer le cœur, je commençais déjà à sentir. La vue d’un homme bien fait excitait en moi une certaine curiosité dont je ne pouvais deviner le motif. L’impression que cette vue faisait sur moi était plus intéressante que les mouvements d’une curiosité ordinaire. Ce trouble avait quelque chose de doux et d’attrayant, dont la singularité frappait ma petite âme. Je cherchais à démêler la confusion de mes idées ; leur obscurité me dépitait, je voulais les écarter, mais c’étaient de courtes distractions, j’y revenais malgré moi ; séduite par un charme innocent, je m’y fixais.