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LA BELLE ALSACIENNE

Mon beau-père et ma mère prirent eux-mêmes le soin de nous mettre dans la couche nuptiale, et comme mon mariage était une alliance clandestine, dont ils voulaient dérober la connaissance à nos compagnons de voyage, ils couchèrent dans la même chambre que nous, pour être en garde contre les surprises.

Cette odieuse nuit, de toutes celles que j’ai passées, celle qui aurait dû être la mieux récompensée, nuit où je fus la dupe de ma confiance et de mon bon cœur, l’unique peut-être que j’aie à me reprocher, cette nuit, dis-je, monument de ma honte et du peu de reconnaissance d’un traître, fut témoin des plus doux mystères.

Amour, as-tu pu permettre qu’un cœur tout à toi fût trompé d’une manière si cruelle ? La bonne foi avec laquelle je me livrais au scélérat qui me jouait méritait-elle d’être traitée avec autant d’indignité ? De combien de caresses j’accablais l’ingrat à qui je prodiguais mes charmes ! tendres langueurs, empressements redoublés transports rapides, mon âme s’abandonna tout