Page:A. Challamel.- Les Clubs contre-révolutionnaires.djvu/571

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Plus lancée que Lucile Desmoulins dans le mouvement politique, Marie-Jeanne Phlipon, femme de Roland de la Platière, eut de véritables réceptions.

Madame Roland, qui habitait au troisième étage d’un petit hôtel de la rue Guénégaud (hôtel Britannique), près de la Monnaie, était née quai de l’Horloge. Elle forma un salon presque exclusivement girondin. Brissot, Pétion, Grégoire, Buzot, etc., s’y donnaient rendez-vous, et y rencontrèrent quelquefois Robespierre et Camille Desmoulins. L’attrait principal était la beauté gracieuse et l’esprit énergique de la maîtresse de la maison, si bien qu’on prétendit qu’elle avait sur son entourage une influence corruptrice. Robespierre n’y parut pas longtemps.

Ce salon, les Montagnards l’appelaient « le boudoir de la Pénélope », et madame Roland était, selon Danton, « la Circé de la République ». Lorsque les politiques y venaient, madame Roland ne se mêlait guère aux discussions que si on en appelait à elle. On parla beaucoup des rolandistes^ delà politique rolandine^ dont on l’accusait d’être l’âme ; on accusa Roland d’avoir fondé un établissement sous le nom de Bureau de la formation de l’esprit public, tout à fait contrerévolutionnaire.

A la suite du premier ministère girondin, quand Servan, Clavières et Roland furent remplacés par Mourgues, Dumouriez et Beaulieu, Roland alla habiter dans une maison de la rue de la Harpe, sous les toits, peu avant la journée du 20 juin 1792. Là vinrent Brissot, Vergniaud, Guadet, Gensonné, Condorcet, Pétion, Lanthenas, Valazé, Pache, Grangeneuve, Louvet, Chamfort, Carra, Joseph Chénier, Dusaulx et Mercier.

Après la victoire de Valmy, Dumouriez, venu à Paris, dîna chez Roland. En entrant dans le salon du girondin, ministre pour la seconde fois, il présenta un bouquet de fleurs de laurier-rose à madame Roland, et s’assit, à table, entre elle et Vergniaud. Cette femme avait, en quelque sorte, une position de reine, — ou tout au moins de triomphatrice républicaine. Le soir de la proclamation de la République par les conventionnels, les principaux girondins se rassemblèrent chez elle.

Précédemment, elle avait reçu Camille Desmoulins, Robespierre, Grégoire ; elle avait, après l’évasion du roi, contribué à la fondation du journal le Républicain.

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