Page:A la plus belle.djvu/45

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— Bonjour, frère Étienne, je viens voir un peu le roi.

— Eh bien, Tranche-Montagne, me répondit frère Étienne (il a l’habitude de m’appeler Tranche-Montagne), tu n’as qu’à attendre au bas de l’escalier de la salle des gardes ; le roi va passer.

J’avais fini ma seconde tourte, qui était bien la meilleure des deux. J’allai m’asseoir sur la dernière marche de l’escalier. Les soudards me regardaient. Vous savez que tout le monde me regarde. Pourquoi ? Demandez aux innocents pourquoi ils mirent la lune !

J’entendis des pas derrière moi sur le pavé de la salle des gardes. Je me retournai. Je vis un bonhomme à l’air malade, habillé de drap brun, avec un bonnet à visière comme les coquetiers montois. À son bonnet pendaient des amulettes d’étain. Il portait, attaché à une chaîne d’orfèvrerie, au beau milieu de la poitrine, un Saint-Michel en argent, gros comme la moitié de ma tête. Il était tout seul avec le prieur claustral. Mais à ce moment-là, des trompettes cornèrent au dehors, et il se fit un grand remue-ménage. La porte du couvent s’ouvrit à deux battants. Un seigneur doré, empanaché, un beau seigneur, celui-là, entra dans la courtine avec une escorte superbe.

— Ah ! ah ! me dis-je, voici, bien sûr, le roi ! — Non, non, me répondit frère Étienne, qui était à côté de moi c’est Jean d’Armagnac, comte de Comminges, qui a été envoyé en mission près du duc de Bretagne.

La courtine s’emplissait de gentilshommes et de soldats. Je cherchais toujours le roi. Quand le comte de Comminges aperçut le bonhomme habillé de drap brun, il s’approcha et lui baisa la main. Après quoi, il lui parla en l’appelant Sire et Votre Majesté. Le bonhomme était bel et bien le roi Louis onzième !

Quelle que soit l’opinion du lecteur sur la façon de conter de Fier-à-Bras l’Araignoire, il est certain qu’il obtenait un énorme succès d’attention.

Il poursuivit : Le roi dit :