Page:Abbé du Prat - Vénus dans le cloître ou la Religieuse en chemise, 1920.djvu/92

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ses pattes, qu’elle y a laissé des marques pour plus de trois jours.

Agnès. — Ah ! ah ! ah ! que cette aventure est plaisante !

Angélique. — Dans le moment, elle fit un cri qui éveilla toutes ses voisines ; elle jeta le pot de chambre par terre, et, se levant promptement, appela tout le monde à son aide. Cependant cet animal, qui n’avait jamais trouvé de morceau si délicat et plus friand, ne quittait point prise. La mère assistante et sœur Cornélie furent les plus promptes à se lever ; elles eurent bien de la peine à s’empêcher de rire à la vue d’un tel spectacle, mais elles se retinrent néanmoins le mieux qu’elles purent et furent obligées de couper la patte de cette bête sacrilège, qui n’abandonna point sa proie jusques à ce temps-là. La mère assistante se retira, et sœur Cornélie, qui est la confidente de madame, passa le reste de la nuit avec elle pour la consoler. Voilà la cause de l’indisposition de notre abbesse, et ce qui l’empêchera apparemment de venir interrompre nos entretiens.

Agnès. — Ah ! je n’oserais paraître, si un semblable accident m’était arrivé, et qu’il fût venu à la connaissance des autres.

Angélique. — Vraiment, il y a bien là de quoi être honteuse ! Elle ne fit rien voir qu’elle n’ait souvent montré à d’autres, et les chevaliers de l’ordre ont mis plusieurs fois la main où l’écrevisse plaça sa patte.