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DOUZE ANS DE SÉJOUR

rares en Éthiopie, se trouvent plutôt chez le natif du deuga, dont les dents sont, en général, moins remarquablement belles ; son visage est plus souvent oblong que rond ; son front large et haut ; l’angle facial ouvert ; les yeux moins grands, le nez plus développé et quelquefois aquilin.

La physionomie de l’homme des kouallas est expressive ; son regard mobile, ardent ; ses gestes et sa démarche trahissent la vivacité de ses impressions ; aussi, manque-t-il ordinairement de cette dignité de maintien résultant de la possession de soi-même. Il est abrupte dans ses façons, original dans ses habitudes, persifleur, goguenard et tapageur ; il parle haut, son élocution est rapide et figurée ; son organe vibrant, souple, musical, sa prononciation claire et sa voix blanche ; ses lèvres sont plutôt minces. Lorsqu’il a le don de la parole, il surprend, touche et remue plutôt peut-être que son compatriote des hauts pays ; mais il est enclin à corrompre la langue par des innovations pittoresques. Il passe pour être imprévoyant, susceptible, colère, franc, charitable, ostentateur, fantasque, actif et indolent par accès, peu soucieux de la vie et impétueux au combat. Il aime les longs festins, la parure, la danse, la musique, la poésie, et lorsqu’au milieu du silence embrasé du midi ou sur le soir, on entend dans la campagne une voix qui chante, c’est celle de quelque chevrier ou de quelque laboureur du koualla qui monte jusqu’à vous.

Sur le bord de son plateau, l’homme du deuga s’arrête, écoute et sourit de plaisir, mais aussi de dédain. Il est plus sobre de paroles et de gestes ; il manifeste moins bruyamment les mouvements de son âme ; sa physionomie et son maintien sont gra-