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DANS LA HAUTE-ÉTHIOPIE

de pied ferme ou la mêlée, selon les conditions de terrain ou les causes morales qui jaillissent du conflit même. Il peut arriver que ces évolutions préliminaires ayant causé des pertes sensibles, les partis se séparent sans en venir à une mêlée ; comme encore la victoire peut dès ce moment se décider si l’un des deux décèle, par un flottement ou d’autres signes, la perte de son assurance. En ce cas, il ne tardera pas à être rompu et morcelé, à moins que ses champions d’élite ne lui redonnent l’ascendant par quelque initiative énergique. Ces moments de crise sont ceux qui fournissent le plus à la verve des trouvères, et c’est à en profiter que vise l’ambition des plus intrépides. Quoiqu’il n’y ait pas de commandements, attaques et retraites se font avec ensemble, au pas de course et sur une ou plusieurs lignes de profondeur ; elles sont inspirées par le désir de prendre ou de refuser tel ou tel avantage de terrain, de position, par celui de couvrir un blessé, de relever un cadavre ou par d’autres motifs analogues. Le combat singulier débute de la même façon, seulement, comme les adversaires n’ont à se préoccuper que de leur propre personne, leurs évolutions se succèdent plus rapidement et donnent lieu à une escrime, où l’agilité, l’adresse et surtout la puissance des poumons ont souvent plus de part que le courage. Deux troupes de fantassins rondeliers s’avancent l’une vers l’autre. À partir de quinze à dix-huit mètres, moyenne du jet efficace de la javeline pour les fantassins, elles commencent à darder quelques traits ; les plus hardis, tenant la javeline par le talon, s’abordent, s’attaquent à coup d’estoc, et quelquefois avant même qu’un seul homme tombe, une des troupes bat en retraite devant l’ennemi, qui la