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DANS LA HAUTE-ÉTHIOPIE

niers ; il fournit les hommes chargés de garder les plaideurs sans caution et perçoit un tant pour leur garde, comme sur toutes les saisies qu’il opère. Il jouit aussi de la perception d’un droit, dit droit de verge, par chaque procès qui se vide en cour du Dedjazmatch ; il est chargé aussi de la publication des bans. Il remet aux parents de la victime la personne du meurtrier condamné à mort, et il assiste comme témoin à l’exécution que les parents en font eux-mêmes. Il commande aux huissiers ; dans les grandes réunions, une verge blanche à la main, il se tient debout à la porte de son Seigneur. Aidé de son lieutenant et entouré de nombreux huissiers, il préside à la police, expulse les intrus, fait introduire les invités, réprime la licence des festins, où les rancunes et les rivalités réveillées par l’hydromel suscitent trop souvent des orages. Il modère aussi les effervescences guerrières, qui donnent lieu aux récits des thèmes de guerre ; car dans ces occasions, les seigneurs se pressent, suivis de leurs bandes en tenue de combat, et des centaines d’hommes surexcités se trouvent en présence les armes à la main. Aussi il est d’usage de choisir, pour ce poste de chef des gardes, un homme d’action, d’une énergie reconnue, et tout dévoué au Dedjazmatch. Cette charge correspond en beaucoup de points à celle de nos Rois des ribauds au moyen âge. Des fiefs importants lui sont assignés, et il siége au Conseil. Dans quelques provinces de l’Éthiopie, ce dignitaire est revêtu de la cotte d’armes en soie ; mais cet honneur n’est point coutumier en Damote. Il commande, au nom de son maître, à environ six cents cavaliers et à mille hommes de pied, entretenus par des alleux en dehors de ses propres fiefs ; de plus, selon sa réputation de générosité et sa popularité parmi les soldats, il peut enrôler environ