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DOUZE ANS DE SÉJOUR

sont assez hautes, ils n’y sont guère plus abrités que s’ils étaient dehors.

Lorsque l’église jouit du droit d’asile, celui qui veut invoquer ce droit s’empresse, en arrivant sous le porche, de sonner la cloche : il déclare à haute voix et par trois fois son intention de prendre refuge ; dès ce moment sa personne est inviolable. Le porche se nomme en amarigna : porte du salut. Si les réfugiés sont nombreux, ils dressent des tentes ou des huttes dans le cimetière. C’est parfois un spectacle curieux qu’un millier d’hommes et plus campés de la sorte, les chevaux broutant l’herbe des tombes ; des selles, des boucliers suspendus aux branches des arbres, des harnais, des housses, des armes de tous côtés ; des femmes préparant la nourriture au milieu des agaceries des soldats ; plus loin, des chefs, la figure mi-couverte de leur toge, causant avec anxiété des événements du dehors ; des blessés couchés sur des herbes sèches et entourés de leurs amis ; ailleurs, des compagnons absorbés dans une partie d’échecs ; d’autres occupés à fourbir leurs armes, à réparer leurs vêtements ; des pages déguenillés courant de tous côtés, provoquant le rire par leurs espiégleries, ou fuyant devant les imprécations de quelque cuisinière à qui ils ont voulu dérober des provisions ; enfin toute une population se livrant activement aux occupations et aux gaietés de la vie, au-dessus d’une autre population endormie dans la mort.

La jolie église de Notre-Dame où nous conduisit le Lik Atskou, est attenante à l’enceinte du Palais-Impérial à Gondar ; par exception elle est bâtie à la chaux. Malgré son style éthiopien, ses matériaux, la juste proportion de ses parties, indiquent qu’elle est l’œuvre d’ouvriers expérimentés. On dit qu’un empereur la fit