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DOUZE ANS DE SÉJOUR

avec une bienveillance croissante. Pour répondre au présent qu’il m’avait fait, je lui donnai une espingole qui parut lui faire grand plaisir. En apprenant que notre bâtiment faisait le commerce, il manifesta le désir de voir des échantillons, et j’en informai le capitaine, qui vint traiter avec lui une affaire assez importante ; et dès ce moment, les gens de notre bord purent circuler librement dans la ville.

Au bout de quelques jours, le vent du sud s’étant ralenti, le capitaine fixa le départ. Je fis mes adieux au Schérif dont les façons me parurent jusqu’au dernier moment dignes en tout d’un chef de son rang. Mais en remontant à bord, j’appris qu’il avait fait faire des menaces au capitaine, pour le cas où il lui représenterait sa facture. Les marchandises étaient livrées ; le capitaine crut prudent de laisser ce cadeau au Schérif, et nous remîmes à la voile.

Nous passâmes difficilement le détroit de Bab-el-Mandeb et, après quelques jours de vent contraire, nous mouillâmes à Aden.

La ville d’Aden est située sur une petite presqu’île, à l’extrémité S.-O. de la péninsule arabique, qui est baignée par cette partie de l’Océan qu’on appelle quelquefois mer du détroit. La presqu’île, au sud, se compose de rochers incultes, stériles et accores qui s’abaissent brusquement au nord et offrent un terrain bas, où est situé un ramassis de huttes qu’on appellerait à peine un bourg en France ; un peu à l’écart, plusieurs grandes et élégantes maisons construites à l’européenne formaient le commencement de la ville anglaise qui s’est élevée depuis. Les Anglais construisaient alors les fortifications imposantes qui font d’Aden une station maritime de premier ordre. On l’aborde facilement, du côté de l’est, par un port affecté aux bâtiments de com-