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(elles seules cultivaient les champs), les commandaient dans leur propre maison. Car celle-ci était lamaison maternelle ; maîtresses de l’héritage, les filles dominaient les fils, les sœurs dotaient leurs frères, et les maris apportaient à leurs femmes la dot. Monde renversé ! pensent les voyageurs grecs ou romains.

Chez les Celtes où, très vite, l’influence de la culture hellénique et de l’esprit romain se traduisirent par l’assujettissement des femmes, respectées seulement comme prophétesses, s’est maintenu encore à l’époque des guerres puniques le souvenir de leur ancienne domination. Lorsque Hannibal a obtenu des tribus aquitaines le libre passage pour son armée, un traité par lui conclu avec les chefs indigènes stipule qu’en cas de différend entre les habitants et les troupes puniques, les femmes gauloises seront arbitres. N’est-ce pas là une preuve que, comme à une époque bien plus ancienne sans doute, les femmes étaient jugées plus aptes que les hommes à recevoir cette lumière d’en haut qui les faisait équitables ? Remémorons-nous d’autre part la gracieuse légende d’Euxène le Phocéen choisi pour époux par la fille du roi des Segobriges ; elle montre chez les Celtes du septième siècle avant l’ère chrétienne des mœurs matrimoniales identiques à celles que les Cantabres, les Basques conservèrent jusqu’à l’époque moderne ! C’est la femme qui choisit son mari. De là à penser qu’elle le commande !… Nous savons enfin que bien souvent les femmes gauloises accompagnèrent les hommes à la guerre, et que leur influence s’exerça dans les conseils.