Page:Abensour - La Femme et le Féminisme avant la Révolution, 1923.djvu/149

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entre le gouvernement et le Parlement, elle n’entend pas laisser celui-ci s’affranchir de l’autorité royale. Si elle prétend ramener les parlementaires au sentiment plus juste de cette autorité, du moins semble-t-elle attendre de bons résultats pour le pays de la réconciliation du roi et des parlementaires. C’est finalement d’ailleurs sa politique qui triomphe. De 1755, date du dernier exil du Parlement, jusqu’au coup d’État de Maupeou, la couronne et le greffe vivent en relative bonne intelligence. Avec l’exil de d’Argenson, que d’imprudentes paroles et une bienveillance déclarée pour les ennemis de la favorite, telle Mme  d’Estrade, avaient compromis, et qui avait démasqué hâtivement ses batteries après l’attentat de Damiens, le chef du parti antiparlementaire, le promoteur des coups d’État a d’ailleurs disparu. Chez aucun autre ministre désormais la favorite ne rencontrera de résistance marquée et son pouvoir sur l’esprit du roi s’exercera sans obstacle.

S’il fallait en croire ses mémoires, apocryphes sans doute mais qui représentent du moins une opinion contemporaine sur son gouvernement, elle aurait poussé le roi vers les réformes lui alléguant les heureux exemples de la Moscovie et du Brandebourg. Mais Louis XV aurait refusé alléguant que, dans un corps malade comme la France, les remèdes risqueraient de faire plus de mal que de bien.

Que ces affirmations répondent vraiment à l’attitude de Mme  de Pompadour, c’est possible si on les contrôle par le témoignage du marquis d’Argenson, qui, pourtant ennemi de Mme  de Pompadour, parlant d’elle, à plusieurs reprises, sans indulgence et lui imputant le mauvais état des affaires, déclare cependant : « Il sort quelques bonnes choses de cette boutique de la favorite, elle adoucit les coups de despotisme des ministres, c’est par elle que le roi s’est accommodé avec le Parlement…, c’est elle qui a jeté le roi dans les partis de douceur et d’équité. Cela se fait si vous voulez dans le dessein de contredire mon frère qui est pour le despotisme et pour les troubles qui y mènent. Mais cela va cependant pour le bien des peuples[1]. »

Dans les affaires religieuses, si étroitement liées aux questions politiques, et qui donnèrent aux différends entre le Parlement et la couronne les principales occasions de se manifester, l’attitude de Mme  de Pompadour est à peu près identique.

Sans être ouvertement favorable aux jansénistes, elle poussa du moins le roi à ne pas prendre contre eux des mesures de rigueur. Sans doute, peut-on attribuer à son influence la déclaration royale du 8 octobre 1754 ordonnant le silence sur la bulle et s’efforçant (1)

  1. D’Argenson. Loc. cit.