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CHAPITRE PREMIER
LA CONDITION LÉGALE DE LA FEMME
i. Pouvoir du mari sur la personne de sa femme. — ii. La séparation. — iii. Puissance du mari sur les biens de la femme. — iv. Condition de la veuve. — v. La mère. — vi. Condition de la jeune fille. — vii. Succession féminine. — viii. Droits civiques de la femme.
i. Pouvoir du mari sur la personne de la femme

La condition légale de la femme à la veille de la Révolution est l’un des aspects les plus caractéristiques de la diversité, de la confusion, de la contradiction que nous retrouvons dans toutes les parties de l’édifice politique, administratif, juridique, élevé sans ordre et sans plan par les siècles et qui font de l’ancien régime un système d’une si prodigieuse complexité et souvent d’une si parfaite incohérence. Des vestiges de féodalité subsistent, là submergés par la marée montante du droit romain ou brisés par les efforts de la législation royale, ici orgueilleux encore et imposants. Le Code Justinien tend à imposer, en la plupart des matières et dans un très grand nombre de régions, sa manière de voir, mais parfois ses dispositions sont annulées par les ordonnances royales[1]. Celles-ci essayent, juridiquement comme administrativement, d’introduire dans le royaume un peu d’uniformité, mais elles ne peuvent toujours y parvenir. Car parfois les anciennes coutumes ou la rigoureuse application du droit écrit trouvent dans les Parlements des provinces (Parlement de Toulouse, Parlement de Dijon) d’ardents zélateurs. Enfin les obscurités d’un grand nombre de textes, surtout ceux des coutumes, les contradictions entre deux lois régissant la même matière et parfois entre deux articles du même texte laissent souvent une très large marge à l’interprétation

  1. Par exemple pour le Velléien, cf. infra.