Il bredouille quelques termes à prétention technique et les autres acquiescent en baissant la tête. Je souris avec une évidente insolence.
— Vous vous trompez, Monsieur !
L’autre se hérisse.
— Comment, je me trompe ? Vous savez mieux que moi ?
Parfaitement.
— Ça, c’est trop fort ! daigne-t-il ajouter en riant. Après tout, c’est possible. Mademoiselle, voulez-vous l’ausculter. Vous serez meilleur juge.
Mademoiselle va m’ausculter ? Ah ! non, par exemple. Le sang m’afflue aux tempes. Sèchement, je refuse.
— Pardon, Monsieur, vous m’avez déjà ausculté hier. Je suis très fatigué et je ne vois pas l’utilité d’un autre examen aujourd’hui.
Il s’incline, bon garçon.
— Mauvaises têtes, ces Bretons ! Heureusement qu’ils ne sont pas tous de vos compatriotes, Mademoiselle de Kergar !
Non, heureusement ! mais quel nom a-t-il dit ? de Kergar ? Non, je me trompe. Mlle de Kergar, Luc Gorman ?…
— Picrate, comment s’appelle-t-elle ?
— Mlle de Kergar. T’as donc pas entendu ?
— Tu es sûr ?
— Archi-sûr, s’pèce de loufoque !
… Picrate, une fois de plus, ne comprend rien de cet héritage qui vient de lui échoir. Sur son lit, j’empile mes réserves : des victuailles, des œufs, des fruits, une bouteille de Graves, des bouquins.
— Tiens ! prends toujours mon bazar. Ça te consolera si jamais je ne te trouve point de ferme à gérer. Cet après-midi, je pars.
— Où ?