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lades. Le jardinier, un honnête paysan qui n’entend rien aux choses de luxe, a concentré son attention sur les navets et les choux. Ses élèves lui font honneur, mais presque tous les rosiers que nous avions greffés de nos mains ont repris l’apparence agreste et les mœurs farouches de l’églantier.

Et les asters bleuâtres qui pullulent ! est-ce une dérision du sort ? Il faut vous dire que ces asters étaient les seules fleurs du jardin en 1858, quand j’y entrai pour la première fois. J’achetais une propriété délaissée depuis longtemps, où tout avait péri, sauf la maison, les arbres et ces asters bleuâtres qui ne demandent aucun soin. Je fus frappé de leur vigueur, sans les admirer autrement, car ce sont des fleurs assez laides et parfaitement vulgaires, et je les supprimai presque aussitôt. Il y avait à la même époque une nappe de lentilles d’eau qui couvrait un petit étang d’un demi-arpent et lui donnait une physionomie par trop mélancolique. On peupla cette eau de canards variés ; on y mit un couple de cygnes, et les lentilles disparurent comme par miracle. Aujoud’hui que je reviens dire adieu à ma pauvre maison, je retrouve les asters bleuâtres en pleine fleur et le petit étang complètement voilé par les lentilles d’eau. Effort, patience et dépense, tout ce que nous avons fait ici en douze ans a presque