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LA RÉSISTANCE.

plus honteux que l’abandon de quelques lieues carrées aux déclassés et aux vagabonds de l’Allemagne.

« Rien ne prouve d’ailleurs que l’Alsace, même aux trois quarts abandonnée par ses possesseurs légitimes, serait colonisée en grand. La race victorieuse est douée d’une prudence au moins égale à son courage ; elle y regarde à plusieurs fois avant e mettre un pied devant l’autre. Lorsqu’un soldat prussien, couvert de gloire et armé de toutes pièces, vient prendre son logement chez de pauvres vaincus effarés et sans armes, il commence par regarder sous le lit, sonder les murs, essayer la clef, vérifier le jeu du verrou, et, toutes ces précautions dûment prises, il ne dort que d’un œil. Jamais on n’a vu conquérants plus soucieux de leur illustre peau. Ils ne le sont pas moins de leur argent, et, si vous en voyez un qui place un liard à la légère, c’est que vous aurez de bons yeux. Immobiliser un vrai capital hors de chez soi, acheter un terrain dont la politique, la force et le hasard seront copropriétaires pendant un siècle ou deux, ce n’est pas une spéculation dans le goût allemand ! Depuis un an que la pauvre Alsace est ouverte aux incursions de l’ennemi, nous avons vu venir des immigrants en foule, mais pas un qui fût décidé à s’établir solidement chez nous. Ils viennent voir, tâter le pays, et s’en retournent presque aussitôt, mal