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II

Le sentiment du bien exerce un tel empire sur les hommes civilisés qu’ils ne commettent jamais une iniquité sans la légitimer d’abord à leurs propres yeux. On se grise de bonnes raisons avant de se ruer aux plus déplorables folies ; on oblige le vrai à se rendre complice du faux, le juste de l’injuste. Un principe respectable, un sentiment généreux, un axiome incontesté devient le fondement abusif, mais spécieux, d’une prétention illogique et souvent inhumaine.

Cet abus, s’il est en somme à l’honneur de la nature humaine, ne contribue pas à éclaircir les questions politiques et économiques. Il permet à deux hommes de s’armer, avec une égale bonne foi, au nom du pour et du contre.

Si la Société typographique, composée de travailleurs honnêtes et éclairés, va déclarer la guerre à quelques malheureuses femmes, il faut qu’elle s’appuie sur quelque fait incontestable et mal interprété, sur un prétexte spécieux qui lui aura servi à s’abuser elle-même. Le plus homme de bien fait flèche de tout bois lorsqu’il a ou croit avoir un intérêt personnel à défendre. Tel argument que nous contesterions s’il était au service de nos adver-